Lettre d’information de JEAN-PIERRE LELEUX – Ancien Sénateur des Alpes Maritimes – Maire honoraire de Grasse
Lettre d’information de JEAN-PIERRE LELEUX – Ancien Sénateur des Alpes Maritimes – Maire honoraire de Grasse

Où l’on reparle du scrutin à la proportionnelle !

Ces derniers jours, Monsieur François BAYROU a mis la pression sur Emmanuel MACRON pour qu’il impose le scrutin proportionnel aux prochaines élections législatives.

C’est un vieux cheval de bataille !

Dans l’esprit de beaucoup, le mode de scrutin de liste à la proportionnelle apparait comme le mode de scrutin idéal, car il vise à doter l’assemblée nationale d’une représentation « homothétique » à l’opinion la population française le jour du vote. Les sièges sont répartis proportionnellement au nombre de voix obtenues par les listes candidates. Cela semble juste ! et idéal ! ….

Mais, en réalité, assez utopique !

Il faut y regarder de plus près pour en déceler les effets pervers.

L’adoption d’un tel système suscite la naissance d’un grand nombre de partis et, donc, d’un grand nombre de listes candidates. La tête de liste espérant ainsi, « rafler » au moins un siège, le sien.

Cela aboutit à l’émergence de nombreux groupuscules à l’assemblée et incite à des jeux d’alliances souvent très pervers, les petits groupes faisant monter les enchères pour constituer, avec les groupes les plus importants, une majorité pour gouverner. S’ensuivent des accords plus ou moins occultes, un « chantage permanent » et il n’est pas rare qu’un groupe minuscule fasse pencher un vote en sa faveur alors même qu’il n’est représentatif que de très peu d’électeurs.

Mon ami, Pepe MENDEZ, qui fut maire de MURCIA, la ville jumelle de GRASSE, où s’applique le scrutin proportionnel, me racontait l’anecdote suivante :

Le Conseil Municipal est composé de 29 membres. L’élection des listes a conduit 14 membres du PSOE, 14 membres du Parti Populaire, et… un membre, tête de liste dite « indépendante ». La voix de l’élu dit « indépendant », était, à chaque réunion du conseil, indispensable pour obtenir une majorité pour les projets du maire et son budget.

Pepe MENDEZ me faisait remarquer que, au-delà de lui avoir mis à disposition le plus beau bureau de la mairie (!), bien sûr, il avait été élu maire grâce à cette voix marginale, mais que, chaque réunion de conseil municipal devait être précédée d’une négociation proche du chantage avec celui dont il me rappelait qu’il avait obtenu, à l’élection populaire, le moins de voix sur la commune.

Voilà comment une minorité – très faible de surcroit – peut finalement diriger une institution démocratique.

Certes le scrutin majoritaire que nous connaissons actuellement pour l’Assemblée Nationale n’est pas idéal non plus, car il ne permet pas, quand un candidat a été battu sur le terrain au terme des deux tours, de valoriser ses voix. Mais ces effets de non prise en compte sont censés se compenser dans la pluralité des circonscriptions, d’une liste à l’autre sur le terrain.

Il a, en tous cas, le mérite de constituer des majorités stables, indispensables pour gouverner.

JPL

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